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© Serge Oboukhoff ; © BnF-CNRS-Maison Archéologie & Ethnologie, René-Ginouvès
© Serge Oboukhoff ; © BnF-CNRS-Maison Archéologie & Ethnologie, René-Ginouvès
Désignation générale : 

coupe

Tasse de Salomon

"Coupe sassanide"

Création / Exécution : 

Asie occidentale, Iran (lieu de création)
6e siècle

Epoque/Style/Mouvement : 

époque sassanide

Matières et techniques : 

or

cristal de roche (taille en camée)

grenat (taille en camée)

verre (vert)

Mesures : 

H. 5 cm, D. 28,2 cm
Hauteur du pied:1.5

Poids 2 110 g

Description : 

Cette coupe est exceptionnelle tout à la fois par son travail, sa beauté et sa rareté et par sa très longue et riche histoire, auréolée de légendes fabuleuses qui l’ont identifiée à l’œuvre du roi Salomon ou au Saint Graal.
Elle est formée d’une lourde résille d’or massif qui enserre trois rangées de médaillons de cristal de roche et de grenats, alternant avec des losanges de verre d’un vert profond, longtemps pris pour des émeraudes, tous sculptés de fleurons en relief au revers. Le large médaillon central en cristal de roche d'une grande pureté, gravé en camée au revers, représente un roi sassanide trônant sur un lit de banquet à pieds formés par des protomés de chevaux ailés. Vêtu de vêtements brodés, paré d’un collier à pendentif et de boucles d’oreilles en poire, il porte la couronne royale à architecture complexe, si lourde que lors des cérémonies elle était attachée par une chaîne d’or au dessus de la tête du souverain. Les 6 coussins sur le lit de banquet qui forme le 7e, symbolisent les sept kešvars ou climats sur lesquels il règne en maître du monde. La structure à 3 rangées de 18 médaillons prend une valeur cosmique. Le roi siège au centre de la coupe comme au centre du monde dont il est le souverain tout puissant.
La représentation du roi est le thème dominant dans l’argenterie de cour. Il est généralement représenté à la chasse mais parfois, comme ici, trônant. Ce motif se retrouve sur une coupe d'argent provenant de Strelka (Saint Pétersbourg, musée de l'Ermitage, S-520 https://eurasiansilver.com/portfolio/1697/).  
Au nouvel an suivant leur investiture, les souverains sassanides recevaient une couronne de règne qui leur était personnelle. C’est donc l’élément clé qui permet de les identifier, par l’étude des monnaies où le roi, toujours couronné, est nommé par une inscription. Par les textes, nous savons cependant que la couleur, invisible sur les monnaies comme sur la coupe, jouait un rôle important dans ces variations. D'autre part dans les arts précieux, les couronnes ne suivent pas toujours des types répertoriés. Ici, la couronne crénelée est ornée sur le front d’un croissant de lune et surmontée d’un autre croissant enserrant le korymbos ou globus, le gros chignon rond des rois, symbole du globe solaire, encadré de rubans. Le roi a longtemps été identifié à Chosroès II (590-628), mais ce modèle de couronne a été porté par plusieurs souverains, notamment Peroz, pendant quelques années (458-465) son fils Kavadh Ier tout au long de son règne (488-530), puis Chosroes I (531-579). La barbe lisse et non bouclée est par contre spécifique à Kavadh Ier, qui pourrait être le commanditaire de la coupe.
Si la glyptique (art de graver des pierres dures en relief –camées-, ou en creux–intailles et sceaux) est très développée dans l’art sassanide, elle concerne surtout des cachets, annulaires , coniques ou en cabochon, gravés en creux, destinés à apposer son sceau. La taille en camée est très rare et ne s’applique qu’à quelques pierres à iconographie royale. Ici, la coupe est laissée lisse à l’intérieur, afin de pouvoir l’utiliser durant le banquet, et gravée en camée à l’extérieur. Outre le médaillon central, tous les cristaux de roche et grenats sont gravés de fleurons.
Pierres et verre sont d’une limpidité et pureté parfaites et d’une exceptionnelle qualité. Si les grenats se trouvent en grande quantité dans le lit des rivières, ceux de dimensions supérieures à 2 cm sont rares et par ce fait, réservés à une élite. De type almandin, leurs analyses pointent vers une origine du Rajasthan.
A l’intérieur du pied a été gravée une inscription en moyen-perse, en écriture pehlevi cursive donnant le poids de l’or au moment de la fabrication : 107 staters (1,733 kg), attestant d’une production sassanide de l’atelier royal puisque le nom du propriétaire n’est pas indiqué. L’écriture pehlevi, qui note le moyen-perse, langue des Sassanides, est dérivée de l’alphabet araméen et se lit de droite à gauche.

Selon les Grandes Chroniques de France écrites par les moines de Saint-Denis au 13e siècle, c’est Charles le Chauve qui donna à l’abbaye en 877 le « hanap Salomon qui est d’or pur et d’émeraudes et fins grenats ». Salomon, roi biblique d’Israël, passait pour le créateur d’œuvres d’un travail raffiné (« opus salomonis ») destinées au trésor du temple de Jérusalem, trésor d’où proviendrait les présents offerts par le calife abbaside Harun al Rashid à Charlemagne en 801. Son petit-fils, Charles le Chauve, les aurait transmis au trésor de Saint-Denis. L’Islam médiéval a d’autre part assimilé Xusro, le roi sassanide Chosroes I, à Salomon. Cette attribution à Salomon perdure dans les livrets du visiteur du trésor de Saint Denis jusqu'au début du 18e siècle. Lorsque la coupe est saisie par les commissaires révolutionnaires en 1791, on y identifie un roi parthe ce qui peut expliquer qu'un objet d'une telle valeur ait été préservé.

Précisions sur les marques et inscriptions : 
inscription en pehlevi à l'intérieur du pied précisant le poids d’or de la monture : 107 statères (env. 1,7kg)

Mode d'acquisition : 
Donateur(s), testateur(s) ou vendeur(s) : 
Date de l'acte d'acquisition : 
30/09/1791
Ancienne(s) appartenance(s) : 
Numéro d'inventaire : 
Camée.379

Autre(s) numéro(s) : 
inv.56.95; Chabouillet.2538

Bibliographie : 

Azarnouche, Samra. "The Khosrow Cup (Cabinet des Médailles, Bibliothèque nationale de France): Looking anew into the Persian Grail" in Anna Caiozzo, Camille Rhoné, Luxe et culture matérielle entre Orient et Occident. Rennes : 2023

Villela-Petit, Inès. La coupe d’orfèvrerie sassanide du Cabinet des médailles : nouvelle attribution. Paris : 2014, p. 729-745
Article de la Revue numismatique, t. 171.
Collection : null
Numéro dans la collection : null

Demange, Françoise. Les Perses sassanides. Fastes d'un empire oublié (224-642) [cat.exp.]. Paris : 2006, p.96-97, n°35 (F. Demange).

Le trésor de Saint-Denis [cat.exp.]. Paris : RMN, 1991, p.80-82, n°10 (D.Gaborit-Chopin).

1789. Le patrimoine libéré [cat.exp.]. Bibliothèque nationale de France, 1989, p.136-137, n°77 (I. Aghion).

Harper-Meyers. Silver Vessels. 1981

Harper P.. The Royal Hunter, Art of the sasanian Empire. New-York : 1978

Cottevieille-Giraudet, R. Coupes et camée sassanides du Cabinet de France. 1938, p.52-64.

Babelon, Ernest. Catalogue des camées antiques et modernes de la Bibliothèque nationale. 1897, p.213-219, n°379.

Archives : 

4 ACM 36 (4 ACM 22) Pièces concernant le trésor de Saint-Denis, 1791-1841.



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